Une œuvre qui a d’ailleurs grandement contribué à faire reconnaître la bande dessinée comme une discipline littéraire.
Maus est un ouvrage tout à la fois biographique, historique et autobiographique, puisque Art Spiegelman y raconte le vécu de ses parents – juifs – dans les années qui ont précédé la seconde guerre mondiale, durant et après celle-ci ; et son propre mal-être, sa difficulté à vivre sa relation à son père (Vladek), ainsi d’ailleurs qu’à sa mère suicidée (Anja) et à son "frère-fantôme" (Richieu), envers lesquels Art - né après la guerre - ressent une profonde culpabilité d’être en vie.
Je conseille vivement la lecture attentive de Maus, à tous, mais plus particulièrement à ceux qui mettent aujourd’hui en doute le bien-fondé du souvenir de la shoah en arguant que celle-ci a eu lieu "il y a si longtemps", que "d’autres génocides ont eu lieu entre-temps", …
Maus offre non seulement un récit humain, quotidien, de la montée des vexations, des restrictions, des interdits, des tentatives de toutes sortes pour déshumaniser les juifs avant même que d’entreprendre leur extermination progressive, artisanale d’abord, industrielle ensuite.
Mais, Maus exprime aussi de case en case, de phylactère en phylactère, comment le traumatisme des survivants a pu se transmettre aux générations suivantes. C’est aussi à ce titre qu’il s’agit d’un ouvrage rare et précieux: nous y voyons interagir un père rescapé de la shoah et son second fils, né après celle-ci. Nous assistons, presque de planche en planche, à la transmission du trauma. Transmission exprimée lorsque Art fait parler son père; mais aussi non-dite, plus pernicieuse lorsque le trauma est transmis par les attitudes, l’absence omniprésente de la mère, ainsi que la disparition de ses carnets qui laissent un vide incommensurable.
Il faut avoir lu Maus !
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